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    Des mots et des images : l'alimentation sur les affiches du Fonds de la guerre 14-18

    En raison de son potentiel iconographique et grâce à la facilité avec laquelle elle transmet le message, l’affiche devient le média privilégié des temps troubles de la Grande Guerre. Elle se saisit rapidement d’un des enjeux majeurs du conflit : la question alimentaire.

    Un média au service de la propagande de guerre

    Pour mobiliser le moral d’une nation, au front comme à l’arrière, il fallait une pression gigantesque et permanente sur les cœurs et sur les esprits. La presse de 14-18 a vu naître ce qu’on a appelé par la suite la propagande dans toutes les nations belligérantes. Les Français y étaient passés maîtres. Les affiches sont un témoignage important de cette pression morale à une époque où le cinéma était muet et peu répandu, où la photographie elle-même était encore à ses balbutiements, où les journaux et les revues ne s’adressaient qu’à une élite. L’affiche devenait alors un média d’envergure à portée universelle.

    Grâce à son contenu graphique et scriptural percutant, elle parle d’autant plus directement aux esprits qu’elle est colorée, ce qui la destine à jouer le rôle d’un moyen de communication et de persuasion de masses extrêmement efficace. Simultanément, l’alimentation devient un des enjeux centraux au sein d’un conflit qui embrase la terre.

    Dans l’affiche de guerre, il s’agit avant tout d’exalter directement le patriotisme : sur les murs, l’image des soldats se mêle souvent aux symboles nationaux, comme sur cette affiche américaine, créée après l’entrée des Etats-Unis dans le grand conflit mondial en 1917.

    Kosciuszko Pulawski walczyli o wolnosc w Ameryce, affiche de propagande américaine par George, Illian (1894-1932), 1917. Source : numelyo | BmL, AffM0272

    L’usage de la langue polonaise et la référence à deux figures majeures de la lutte pour la liberté de la Pologne et des Etats-Unis, Tadeusz Kosciuszko (1746-1817) et Kazimierz Pulaski (1745-1779), en font un exemple de communication politique qui repose sur une histoire commune polono-américaine. Les Etats-Unis sont le monde, sans exclure l’Est de la vieille Europe. C’est un portrait de Kosciuszko peint par Kazimierz Wojniakowski (1772-1812) en 1794 qui a inspiré le dessinateur George Illian (1894-1932), par l’intermédiaire d’une gravure de l’artiste autrichien Josef Grassi (1757-1838). Les aplats de couleurs vives et la typographie, où dominent le blanc, le rouge et le noir, expriment une synthèse américaine claire et dynamique des acquis européens dans le domaine du portrait.

    Ces grandes figures de l’histoire sont garants de la légitimité et du succès du message adressé à la communauté polonaise des Etats-Unis. Ainsi, à l’image de Kosciuszko et Pulaski qui ont lutté pour la liberté des Etats-Unis, il faut à présent aider l’armée américaine à combattre pour la liberté de la Pologne. Ce tribut passe par des économies de blé, de viande, de gras et de sucre qui nourriront les soldats.

    Cardinal Mercier has appealed to the Food Administration, affiche de propagande américaine par George Illian (1894-1932), 1917. Source : numelyo | BmL, AffM0270

    A travers cette deuxième affiche, la US Food Administration annonce que le Cardinal Mercier demande de l’aide alimentaire pour l’Europe en guerre. Il est donc à l’origine de l’appel aux restrictions alimentaires qui permettraient le don de produits de première nécessité aux populations civiles de France, de Belgique et d’Italie.

    Les deux affiches du Fonds de la Guerre – l’une avec le Cardinal Mercier, l’autre avec Kosciuszko, utilisent le même langage graphique. La première affiche est en anglais et s’adresse à l’ensemble des Américains, l’autre vise directement la communauté polonaise dans sa langue d’origine. A l’époque, le Cardinal Désiré-Joseph Mercier (1851- 1926) est un personnage connu. Professeur de philosophie à l’Université catholique de Louvain, il devient une figure de la résistance nationale face à l'occupation allemande de la Belgique. Il est entré en opposition avec le gouverneur de la Belgique lorsqu’il refusa d’envoyer ses compatriotes cultivateurs dans des usines allemandes et fut arrêté.

    Son audience s’étend bien au-delà des seuls cercles catholiques et rencontre un puissant écho aux Etats-Unis qui l’accueilleront très chaleureusement après la guerre, en 1919.

    Dans tous les pays en guerre, l’appel aux économies est de rigueur. Elles touchent tous les domaines de la vie quotidienne, de l’éclairage aux transports civils, en passant par la nourriture, enjeu décisif pour l’issue du conflit. La plupart des populations sont contraintes à de très fortes restrictions alimentaires. Si l’Allemagne, soumise au blocus économique de l’Entente, instaure le rationnement dès 1915, la France et l’Angleterre délivrent des cartes de rationnement pour le pain, le sucre et la viande un peu plus tard, au tournant des années 1917-1918.

    Un langage graphique élaboré pour transmettre un message

    L'affiche se nourrit d’un style et d’une tradition qui sont différents selon les pays. En France, la dimension nationale s’impose immédiatement et le spectateur est immergé dans l’histoire. Les Anglo-Saxons misent sur la modernité, utilisant un discours très direct, vocatif, souvent basé sur des messages comportementaux, reposant sur des ressorts publicitaires.

    Les affiches américaines du Fonds de la Guerre 14-18 appellent la population à modifier sa consommation alimentaire au profit de l’armée et des alliés de l’Entente. Elles encouragent à consommer moins de produits de la terre, et, en revanche, plus de poissons car ils se nourrissent eux-mêmes. Elles incitent à épargner des produits de base comme la farine, la viande et le sucre. Leur contenu graphique n’est pas moins saisissant. La première affiche de la US Food Administration représente probablement la perche d’Amérique, une espèce de poisson d’eau douce, dessinée dans son milieu aquatique. Cette espèce carnassière originaire du Nouveau Monde a été introduite en Europe à la fin du XIXe siècle, ce qui peut être une façon de faire le lien entre les deux continents, d’autant plus que l’auteur de l’affiche, Charles Livingstone Bull (1874-1932) était non seulement un dessinateur et illustrateur de renommée, mais aussi un grand connaisseur du monde animal. Il a étudié la taxidermie à Rochester. Grâce à ses fréquentes visites au zoo Bronx à New York et aux nombreux voyages en Amérique Centrale et du Sud, qu’il a par ailleurs décrit dans son livre « Under the roof of the jungle », il a pu saisir les animaux dans leur milieu naturel, ce qu’il transpose parfaitement dans cette affiche.

    Save the products of the Land affiche de propagande américaine par Charles Livingston Bull (1874-1932), 1917. Source : numelyo | BmL, AffM0021

    Eat more... eat less... affiche de propagande américaine par Nathaniel Lord Britton (1858-1934), 1917. Source : numelyo | BmL, AffP0312

    L’espace de cette affiche est tout autre. Divisée en deux parties, visuelle et textuelle, bien distinctes, ses éléments iconographiques réveillent une sensibilité à l’art classique. La composition évoque une appétissante nature morte confectionnée de fruits et légumes frais, agrémentés d’une truite occupant le premier plan. L’appel est clair et contient une liste d’aliments qu’il faut éviter de consommer, comme la farine, la viande, le sucre et les gras au profit des denrées recommandées, préparées entre autres à base de maïs, d’avoine et de seigle. L’auteur, Nathaniel Lord Britton (1859-1934), était un géologue et botaniste américain qui, dès son plus jeune âge, s’était passionné pour l’histoire naturelle. Il a étudié à l’Ecole des Mines de l’Université de Colombia, avant d’y enseigner la géologie et la botanique. Parmi ses publications scientifiques, « La flore illustrée du nord des États-Unis, du Canada et des possessions britanniques» parue en 1896.

    Semez des pommes de terre affiche de propagande française par Georges Hautot (1887-1963), 1915. Source : numelyo | BmL, AffM0377

    Cette affiche française, « Semez les pommes de terre », créée par le dessinateur et illustrateur Georges Hautot en 1915, joue sur un autre ressort en indiquant la famille et les différentes générations qui constituent le corps social : le soldat père de famille, la mère, les enfants, les vieillards. Toute une imagerie de scènes familiales invite le public à se reconnaître, à s’identifier et à agir selon l’exemple préconisé par les images. La puissance du slogan s’affirme dans l’espace public alors même que la guerre devient une question de gestion des ressources humaines et matérielles. De manière générale, ce sont souvent des images fortes accompagnées de phrases courtes, dont le message est compréhensible pour tout le monde, qui structurent le langage des affiches.

    Le dessinateur et illustrateur Georges Hautot (1887-1963) fait partie des créateurs d’affiches français les plus connus. Quasiment autodidacte, cet artiste originaire de La Manche participe en tant qu’employé des Postes parisiennes à la première exposition du salon organisée par la Société artistique des PTT. On décèle dans son oeuvre une authentique sympathie pour les gens modestes. Outre les dessins d’affiches, il réalise des projets de cartes postales et calendriers. Georges Hautot illustre des journaux satiriques et de nombreux ouvrages en maintenant ce ton incisif qu’il développera au-delà de la Grande Guerre.

    Les affiches du Fonds de la Guerre 14-18 utilisent une rhétorique qui relie le front et les réalités sociales. Ces supports deviennent les porte-paroles privilégiés d’une guerre totale dont les performances sont tributaires des efforts de la société civile. Exploités par toutes les parties du conflit et répliqués en de multiples exemplaires, ils dialoguent avec les préoccupations quotidiennes des populations, tout en mobilisant la société dans la durée.

    La lithographie

    En 1789, Aloys Senefelder, acteur et auteur dramatique allemand, découvre, ou plutôt invente la lithographie. Le principe est le suivant : on applique le dessin avec un crayon gras sur une pierre calcaire à grain fin et soigneusement polie ; on lave la surface avec une eau légèrement acidulée, on imprègne la pierre avec l’encre et celle-ci n’est retenue que sur les parties grasses ; on presse alors sur la pierre une feuille de papier qui s’imprime d’elle-même. Quelque temps après, on utilise le zinc, puis le cuivre, mais la pierre garde la préférence des artistes. C’est à partir de 1830 que l’affiche lithographiée prend un essor considérable, en même temps que le prodigieux développement industriel qui devait marquer tout le XIXe siècle. A cette période, l’apparition des luttes sociales et politiques et la revendication du suffrage universel sont autant d’occasions de campagnes passionnées dans lesquelles l’affiche tient un rôle essentiel.

    Bibliographie

    Dossier rédigé par Anna Germeyan, chargée de la valorisation du Fonds 14-18 à la BmL.

    Pour citer cet article

    Référence électronique

    Anna Germeyan, Des mots et des images : l'alimentation sur les affiches du Fonds de la guerre 14-18, numelyo [en ligne], mis en ligne le 2023-01-05, consulté le 2024-04-30 16:19:21. URL : https://numelyo.bm-lyon.fr/BML:BML_00GOO01001THM0001Alim_1418

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