[Gérard Collin-Thiébaut, artiste situationniste]

droits Creative Commons - Paternité. Pas d'utilisation commerciale. Pas de modification.
localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0740 FIGRP04330 002
technique 1 photographie négative : noir et blanc ; 24 x 36 mm
historique Il a déjà joué avec des distributeurs de timbres poste. C'était en été 1989 au musée d'Art Moderne de la Ville de Paris. Six ready made qui n'en n'étaient pas, selon la propre formule de Gérard Collin-Thiébaut. En bon artiste situationniste qu'il est, ce dernier avait détourné notamment six tableaux appartenant aux collections du musée. Un Picasso, un Bonnard, un Léger... Il avait aussi dans ses carnets d'images réuni quelques monographies présentées par l'ARC de 1983 à 1988 et quelques-uns des premiers portraits du milieu de l'art que lui-même réalisait alors. Il s'intéresse aujourd'hui aux horodateurs. A ces appareils qui vous vendent du temps et de l'espace et contre quelques piécettes vous distribuent un ticket. Intérêt de circonstance comme toujours chez-lui. Mais qu'on ne s'y trompe pas, la fortuité n'est qu'apparente et son surgissement dans l'oeuvre de l'artiste pas sans logique. L'objet d'art, pour Collin-Thiébaut commence à la reproduction d'une image. Quelle qu'elle soit. Des images mythiques qui truffent l'Histoire de l'art à celles des quotidiens, aussitôt vues, aussitôt oubliées. D'une certaine façon, il s'agit de faire écho à... N'avoue-t-il pas d'ailleurs qu'il se sent comme la nymphe amoureuse de Narcisse. Un amour sans espoir. Une reproduction infinie. Mais une reproduction qui n'est pas répétition imitative. Il s'agit de se montrer en montrant les autres, de parasiter l'oeuvre d'autrui pour construire sa propre oeuvre. Mais appropriation et citation, ces deux mamelles de l'art contemporain, ne sont qu'épiphénomènes dans l'art de cet artiste beaucoup plus retors que celà. Là fantaisie, l'humour, l'esprit d'enfance teintent depuis toujours l'oeuvre discrète de Gérard Collin- Thiébaut. On sent qu'il se souvient des collections de timbres, des albums de coloriage et des tablettes de chocolat de ses jeunes années... "Un tableaux c'est sérieux", dit l'artiste. Sans doute est-ce pour cela que lui même n'y touche pas, préférant s'attacher à ceux des autres, à leur image, dans une démarche qui est l'ambiguité même. Puisqu'à la fois, sacrilège, il les désamorce, ces tableaux de maîtres, en les manipulant, leur donnant, par exemple, le format d'un timbre poste, recolorié de surcroît, et qu'il leur offre une diffusion à laquelle ils ne sont pas habitués. Au musée imaginaire il préfère le musée de poche, disponible en self-service... Il distribuait autrefois gratuitement ses petites images, il les vend à présent, techniques publicitaires et commerciales à l'appui. Il en coûte à l'amateur juste quelques francs. Mais beaucoup plus pour le collectionneur. Une jolie parodie des arcanes du marché de l'art, de la valeur des oeuvres et de leur fétichisation, que les poinçonnages de G. C-T. La grandiloquence, voilà ce qui effraye (ou amuse) le plus Gérard Collin-Thiébaut, plus enclin à la conscience de l'éphémère, et à la la modestie du fugace. Aux fastes du spectaculaire, à la boursoufflure du mythe, il oppose un art de la litote laconique qui laisse perplexe. Entre le lard et le cochon, on ne sait que choisir. Ironique, son rapport à l'art. A l'héritage des Anciens, comme à l'art contemporain, d'ailleurs. Confortant cette entreprise critique de dérision, il y a, autre dimension dans son oeuvre, la mise en valeur d'une iconographie vulgaire. Quand il rehausse, par exemple, de crayons de couleurs la Une de tel ou tel quotidien ou quelque page intérieure grisounette. On peut le voir en ce moment [en septembre 1991] à la galerie Verney-Carron où il expose ses portraits d'artistes en petits soldats, colorier obstinément, alors qu'il a horreur de cela, les actualités régionales, nationales et internationales, toutes rubriques confondues. Littéralement, peintre sur le motif. Renversant l'attitude de Marcel Duchamp, Collin·Thiébaut sous des allures timides pratique la plus belle des insolences. Au "Ceci est de l'art parce que je le décide" du vieux Marcel, il substitue un aussi péremptoire "ceci est du Collin-Thiébaut", Avec l'ironie en plus. Source : "Gérard Collin-Thiébaut ou l'imagier facétieux" / N.G. [Nelly Gabriel] in Lyon Figaro, 11 septembre 1991, p.22.
note à l'exemplaire Ce reportage photographique contient 12 négatifs.
note bibliographique "Le Pérugin par Gérard Collin-Thiébaut en quatorze images" / [Nelly Gabriel] in Lyon Figaro, 11 septembre 1991, p.19. - "G. Collin-Thebaut joue aux petits soldats à la galerie Verney-Carron" in Le Progrès de Lyon, 4 septembre 1991.

Retour