[Henri Bouvarel, directeur de l'Ecole Chevreul]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0759 FIGRPTP0677 04
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 15 x 20 cm (épr.)
description Adresse : Ecole Chevreul, 21, rue Sala, Lyon 2e (depuis 1953) ; 2, boulevard des Tchécoslovaques, Lyon 7e (depuis 2018).
historique Alors que nous sommes en pleine époque d'inscriptions scolaires, pour la première fois l'école Chevreul compte dans ses dossiers, un contingent masculin ! Petite révolution dans les vieux murs de la plus célèbre des instituions pour jeunes filles de bonnes familles lyonnaises. L'édifice datant de 1915 joue le jeu des années quatre-vingt, il fallait s'y attendre. Pour le nouveau directeur de l'école, M. Henri Bouvarel (le premier homme au poste !), ce changement, loin d'être une triste fatalité est au contraire une nouvelle dynamique, la poursuite logique d'une ouverture qui n'hypothèque en rien les principes de l'établissement. Afin de comprendre cette évolution qui a tout de même fait battre la chamade dans bien des coeurs nostalgiques, il faut se souvenir que l'école Chevreul s'était ouverte pour répondre à des besoins précis. Sous l'impulsion de l'ingénieur Chevreul, les fondatrices de la Société de Jésus-Christ avaient un but. très net : l'accès du monde féminin à un niveau supérieur de culture. Leur pédagogie s'inspirait de la spiritualité Ignatienne, c'est à dire une éducation ouverte et intégrale reposant sur un principe, la dignité de l'enfant comme personne humaine et comme fils de Dieu. Un visée essentielle d'autre part : le développement de la personne totale, en s'adressant à la liberté de l'enfant et enfin, dernier point, la formation de l'esprit par les armes de l'esprit. Long débat. Depuis, l'école Chevreul a grandi, progressé en s'adaptant aux nécessités de la société dans laquelle elle est inévitablement plongée. Une valeur a été constatée, une réputation s'est imposée. Les raisons de cette réputation sont les ressorts de l'entreprise Chevreul, aussi depuis plusieurs années beaucoup songeaient tout simplement à étendre le champs d'action : pourquoi pas des garçons ? Long débat. Pour certaines familles, ce qui faisait le résultat d'une telle éducation scolaire et humaine résidait justement dans le cloisonnement. Pour d'autres, une telle idée engendrerait tôt ou tard, l'affaiblissement de l'école. Professeur dans l'école depuis 1982, Henri Bouvarel nommé directeur en 1986 au départ de Mlle Duvault, veut résoudre le problème d'une manière ou d'une autre. "A aucun moment je n'ai voulu imposer quoi que ce soit, explique-t-il, mais simplement savoir si oui ou non une majorité se dégageait pour la mixité". Un sondage est fait ; 65% des représentants des familles sont favorables, 20% sont indécis, le reste est contre, la mixité est décidée. "Elle se fera d'une façon très progressive, souligne M. Bouvarel, qui d'ailleurs de par son expérience professionnelle est très au fait de ce genre de mutation (il a créé une mixité à Paray-le-Monial en 1970). "Le Conseil d'Administration a décidé d'accueillir les premiers garçons à la rentrée 1987 en classes de sixième et seconde, en 1988 les classes de première et cinquième, en 1989 les quatrième, troisième et terminale. Dès maintenant les demandes d'inscriptions affluent. Pour les parents je crois qu'il semble logique, après avoir vu leurs enfants grandir dans des établissements mixtes, de continuer en collège et lycée. Ils cohabitent, pourquoi une soudaine ségrégation qui n'a aucun écho dans la société ? Le développement de leur enfant leur paraît plus harmonieux. En fait la mixité fait plus problème aux parents qu'aux enfants qui ne se posent pas de questions". Mais ceci ne veut pas dire qu'un établissement conçu pour des filles ne connaisse pas de problème pour vivre la mixité. "Il faut prévoir des aires de détente plus vastes pour les garçons, aménager les inter-cours et surtout le temps de libre entre midi et deux heures, créer des clubs de loisirs, etc. Des journées pédagogiques sont prévues pour étudier cela au plan technique, mais aussi humain. Comment un encadrement fait en majorité de femmes va-t-il s'adapter à une assistance nouvelle, avec des réactions inhabituelles ? Pour éviter tout problème, je souhaite la présence dans l'établissement d'un conseiller pédagogique, une sorte d'animateur, homme équilibré et bien implanté sur Lyon. Enfin, notre atout sera de conserver intégralement les principes de l'école". En effet, M. Bouvarel se veut le garant des valeurs les plus traditionnelles et les plus vivantes de Chevreul en dehors de la rigueur de sa discipline : ses engagements catholiques. La mixité n'y changera rien, l'optique chrétienne bien spécifiée au moment de l'inscription des enfant, n'est pas vécue dans "l'à peu près". Deux heures de catéchèse obligatoires de la sixième à la seconde, puis une heure de culture religieuse et enfin possibilité de choix en terminale avec un point fort, ce sont parfois des élèves de terminale qui assurent la catéchèse des petits ! Pour M Bouvarel aucune crainte donc devant la mixité qui ne changera pas, selon lui, l'esprit de la maison. Cet homme qui, pour devise professionnelle, a choisi d'être présent à tous et à tout, pourrait bien réussir parfaitement ce changement de cap. N'assure-t-il pas : "Je connais tous mes élèves et je ressent avec eux presque une vie de famille, heureuse, chaleureuse". Source : "La révolution tranquille" / Philippe Boyer in Lyon Figaro, 25 février 1987, p.11.
note bibliographique "Henri Bouvarel : une double révolution tranquille" / André Mure in Le Progrès de Lyon, 12 février 1987.

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