[La Croix de la place Joannès-Ambre]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0740 FIGRP07323 004
technique 1 photographie négative : noir et blanc ; 24 x 36 mm
historique Au sommet de la Croix-Rousse, vient d'être érigé une croix, pas tout à fait rousse, mais faite pour ressusciter l'image qui a déterminé le lieu-dit. Une affaire d'identité, disent les poseurs de croix. Quelle identité ? s'insurgent les défenseurs de la République en général et de celle des Canuts en particulier.
historique Lorsque quelques épreuves du baccalauréat se déroulent dans l'enceinte d'un établissement religieux, lorsque Fourvière déploie son enseigne lumineuse "Marie, mère de dieu" au-dessus de la ville... Ils sont là, les sourcilleux militants de la cause laïque et républicaine. Et lorsque au sommet de la colline de toutes les insurrections se dresse tout à coup le symbole même du christianisme, le Comité Laïcité et République reprend du service. "L'histoire de la Croix-Rousse, c'est le moins que l'on puisse dire, ne se confond pas avec celle de l'Eglise", proclament-ils, bien décidés à faire tomber un emblème confessionnel qui n'a rien à faire dans un espace public. Au carrefour Joannès-Ambre, à l'exact sommet de la montée de la Boucle qui, d'ailleurs, est devenue une descente, a été plaqué il y a peu l'inévitable carrefour des années quatre-vingt-dix : le giratoire. Le modèle présent est vaste, un peu alambiqué et tente d'unir la pente et le plateau, le moderne et l'ancien, sans grand bonheur, il faut le dire. En outre, le problème numéro un du giratoire est qu'il possède un centre dont la décoration est ordinairement laissée à l'appréciation des maires, en l'occurrence celui du 4e arrondissement ; or, dédaignant les fleurissements ordinaires et les conseils de sécurité préconisant d'éviter et les obstacles et les constructions en dur, Gabriel Caillet a opté pour un grand retour aux sources et à la croix dont la couleur donna son nom à tout un quartier. Depuis le mois de décembre, une croix, pas rousse du tout, domine donc l'automobiliste en plein effort rotatif et Gaby le magnifique assume et signe : "Qui ose dire que je me repends d'avoir autorisé l'installation de cette croix, non seulement je ne regrette rien, mais j'en revendique la paternité ou presque. Elle s'inscrit dans le cadre d'une zone d'aménagement concerté et qu'on se le dise : si on a choisi une croix, ce n'est pas pour faire plaisir aux curés et emmerder les laïcs ; si on ne la fait pas bénir, c'est pas pour faire plaisir aux laïcs et emmerder les curés, c'est le nom du quartier, je n'y peux rien et puis la faire réaliser sur un modèle ancien, ça a coûté beaucoup moins cher que de commander une sculpture, ça c'est garanti. Des lettres de félicitations j'en ai plein, tout le monde est très content". Tout le monde, ce n'est pas si sûr. Qui a fait de la vigilance un principe aussi inaliénable que la séparation de l'Eglise et de l'Etat ne peut permettre qu'un symbole religieux soit revendiqué par des élus de la République. Jean Pétrilli, président régional du Comité laïcité et République, a donc, au nom de ses adhérents, adressé plusieurs missives de protestation aux représentants des collectivités locales concernées et il se propose maintenant de porter l'affaire devant le tribunal administratif. "Il ne s'agit que de faire appliquer les lois de la République puisqu'il n'y a plus aucune organisation pour prendre en charge les valeurs de cette laïcité qui est bien une des spécificités de l'Etat français. Or la laïcité est un espace de liberté et notamment de la liberté de croire ou de ne pas croire. Il s'agit d'intégrer cette dimension dans toutes les réflexions, de porter un regard laïc sur toute chose, de refuser des discours qui passent pour naturels jusqu'au jour où c'est trop tard, où l'intégrisme religieux fait la loi. Face à la montée de l'irrationnel, à une époque où les églises se vident, tandis que la hiérarchie catholique se radicalise sur des discours passéistes et dans un pays où plusieurs croyances cohabitent, tout le monde a intérêt à défendre la laïcité partout où elle est attaquée". Et la croix de la Croix-Rousse serait une sournoiserie à bouter d'urgence hors du domaine public. Source : "La Croix... et la bannière laïque" / Sophie Bloch in Lyon Figaro, 25 février 1995, p.1.
note à l'exemplaire Ce reportage photographique contient 18 négatifs.
note bibliographique "A chacun sa croix" / Gérard Corneloup in Lyon Figaro, 25 février 1995, p.4.

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