[Stade Le Corbusier à Firminy]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0771 FIGRPT1380 02
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 24 x 18 cm (épr.)
historique [...] Tout le monde ne peut pas s'enorgueillir de posséder un édifice construit par Le Corbusier. Firminy les collectionne : quatre, dont un inachevé. Une unité d'habitations sur les hauteurs, une église restée à l'état de squelette, la fameuse Maison de la culture, qui fait tant parler d'elle pour des raisons extra-culturelles et un gigantesque stade de quatre mille places. Ces deux derniers formant une sorte de pool sport-culture, au fond d'un val encaissé entre deux anciennes carrières. "Ce stade est la dernière réalisation de l'architecte dans notre région. Il date de la fin des années soixante. Lui aussi est rongé par l'humidité", signale Marc Botlan. Il est vrai qu'à Firminy, le seul nom de Le Corbusier a longtemps passé pour donner des boutons à la municipalité communiste. N'avait-il pas été appelé par l'ancienne équipe regroupée derrière Claudius-Petit ? Heureusement, en 1984, les Monuments historiques classaient le stade. Une sorte de vaste nef échouée sur l'herbe, qui sert surtout à l'entraînement. Le responsable municipal venu accueillir les visiteurs se souvient pourtant l'avoir vu plein de supporters. Deux fois. Alors qu'un unique utilisateur entame un nouveau tour de piste, les hommes de l'art de penchent sur les micro-fissures zébrant le béton. "Elle est nouvelle celle-ci !", s'exclame Didier Reppelin. Et d'évoquer les maux qui frappent l'infortuné édifice : la stabilité, d'abord, avec des contreforts soutenant l'ensemble ayant une fâcheuse tendance à bouger sur leurs bases. L'étanchéité, surtout. Avec des gouttières ici et là, des fers rouillés, un gigantesque auvent à consolider. "Avec Le Corbusier, c'est toujours le même problème. D'abord il ne mettait quasiment jamais les pieds sur ses chantiers. Et ses plans n'étaient souvent que des ébauches. Ses adjoints faisaient au mieux sur place, en adaptant les idées du grand homme. Ensuite, il choisissait curieusement ses entreprises. D'ailleurs la plupart d'entre elles a disparu", souligne l'architecte. "Regardez moi ce béton. Mal dosé, pas assez comprimé... D'où les fissures et les fuites". La première tranche de travaux, terminée en juillet 1987, a concerné la terrasse recouvrant vestiaires, sanitaires et rangements. Un véritable gruyère... Et des douches où l'eau coulait doublement. Quand on a ouvert feu les joints d'étanchéité et enlevé les dalles, on s'aperçut que tout pourrissait à l'intérieur. Mélange pulvérulent et malodorant. Il fallu même changer l'équipe d'ouvriers rendus malades par les émanations. La seconde tranche commence en septembre. Plus spécialement axée sur la consolidation des murs. Injection de résine sous forte pression à la clé. "Finalement, avec Le Corbusier une restauration est encore plus difficile qu'avec un édifice roman. On manque de documents mais, de plus, il faut marier deux données opposées : respecter ses idées de dénuement extrême et protéger ce mauvais béton. La véritable quadrature du cercle", souligne Didier Reppelin. Alors que tout le monde patauge dans les dix centimètres d'eau occupant le local du matériel. Reste des dernières pluies. Atmosphère quasi irrespirable. Retour à l'air libre. Un coup d'oeil vers l'unité d'habitations, non classée... Mais dont les deux tiers des quatre-cent-quatorze logements sont libres. Un regard vers l'église désarticulée, bardée de murs en moellons, histoire d'arrêter les gamins qui vont y faire éclater des pétards. Rapport à la résonance du lieu. Deux sont en train de l'escalader. Excursion vers la Maison de la culture qui cache son problème sous les toits. Une toiture légère, reposant sur des câbles suspendus, fixés aux murs. Ils se sont dangereusement distendus. Après la neige de 1971. Un spécialiste des ponts suspendus étudie la question. On attend son rapport. Sans parler des gouttières. Là aussi. Sacrée humidité... Source : "La Loire sauvée des eaux (III) : de Saint-Marcel-de-Félines à Firminy" / Gérard Corneloup in Lyon Figaro, 20 août 1988, p.27.

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