[Le lycée professionnel Magenta à Villeurbanne]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon
technique 1 photographie numérique : couleur
historique Les élèves en rupture scolaire interpellent de façon de plus en plus pressante l'Education nationale. En France, il sont 8%, soit quatre-vingt mille, à sortir du système sans qualification. Ce qu'ils deviennent, il est difficile de le savoir... Mais leur nombre appelle une réponse. Dans l'académie de Lyon, en octobre 2000, le recteur Dubreuil a nommé un chargé de mission, afin de monter un projet innovant. Christian Terras a d'abord été voir les dispositifs existants de l'école de la seconde Chance à Marseille, créée à l'initiative d'Edith Cresson, à Melun-Sénart, pour un public d'élèves de terminale ayant échoué au bac pour la troisième fois. Puis, pour définir le public, il a rencontré la quinzaine de missions locales de l'agglomération. D'une rencontre à l'autre, il a précisé le secteur où le concept qui allait être testé, les méthodes pédagogiques. C'est le milieu de la formation professionnelle qui a été choisi car, selon les missions locales, c'est le public qui souffre le plus de l'inscription dans la réalité professionnelle et économique. À qualification égale, les filles s'en sortent encore moins. Et c'est donc le secteur tertiaire qui a été choisi pour expérimenter un système de reconnexion. Depuis octobre 2002, le lycée de la nouvelle chance a ouvert ses portes avec vingt-quatre élèves. Il est parfaitement intégré au sein du lycée professionnel Magenta joliment rénové, qui forme deux cent cinquante-six élèves au bac pro logistique ou exploitation/transport, bureautique et aux BEP des métiers de la mode, comptabilité, avec un certain succès en terme de débouchés professionnels. Cette fusion des deux a pour objectif de contrer tout effet de ghettoïsation, et la greffe, selon Christian Terras, semble avoir pris. Les vingt-quatre élèves ont entre 21 et 23 ans, ils ont décroché du système scolaire depuis au moins un an et parfois jusqu'à cinq ans. On a conçu sur mesure pour eux deux BEP tertiaires "turbo" : l'un en secrétariat, l'autre en comptabilité, à raison de douze élèves. Au départ, une liste de cinquante personnes avait été proposée par les missions locales. Ces jeunes gens effectuent leur formation en un an, au lieu de deux, et passeront leur diplôme en juin. C'est la formule de l'alternance qui a été choisie à raison de trois jours dans les locaux scolaires et deux jours en entreprise. Avec un travail individualisé et un aller retour constant avec les missions locales qui sont appelées dès qu'un problème surgit car les conseillers connaissent mieux les interférences de l'histoire personnelle, familiale de chaque jeune. "Chez nous, Education nationale, travailler avec un partenaire extérieur ne va pas de soi", reconnaît Christian Terras, chargé de mission au rectorat, qui apprécie d'autant mieux le chemin parcouru par les deux partenaires. Actuellement, par exemple, le BEP turbo est confronté à un problème d'absentéisme de certains inscrits qui, en retrouvant le chemin du lycée, ont aussi dû se confronter à l'astreinte d'horaires contraignants et à un engagement intensif. Mission locale et Education nationale gèrent le problème ensemble. Mais globalement, la greffe a pris au lycée Magenta. Avec un bel engagement de l'équipe pédagogique, notamment de jeunes professeurs issus de l'IUFM. Les enseignants travaillant à 50% avec cette classe spéciale et l'autre moitié du temps avec les élèves du lycée. Si on compte quelques cours magistraux, le principe est le travail individualisé, tenant compte des acquis de chacun, et le travail en demi groupe. En raison d'une restructuration récente, l'établissement a en effet des opportunités en terme de place et un bel équipement de salles informatiques (cent vingt ordinateurs) intéressant pour une formation qui veut mettre en place une partie individualisée en e-learning. Certes, au début, des craintes étaient perceptibles, mais désormais l'établissement est plutôt fier de tester un dispositif dont l'extension est l'objectif. Sous réserve du bilan de fin d'année, la formation étant accélérée en un an, et se terminant en juin, l'an prochain, le nombre d'élèves inscrits dans le lycée de la nouvelle chance sera doublé. "On veut monter la deuxième étape de la fusée, avec un bac pro vente et peut-être secrétariat administratif", annonce Christian Terras. Pour les élèves, le proviseur René Michel Liblin espère "faire le maximum pour l'insertion professionnelle du groupe, voire pour certains récupérer un cycle de formation traditionnel, le bac pro". Les vingt-quatre élèves sont stagiaires de la formation professionnelle et rémunérés comme tel par la Région, environ 300 euros. Quant au coût de cette formation expérimentale, le conseil régional la finance à raison de 800.000 francs sur deux ans, le fonds social européen versant 600.000 francs sur deux ans et l'Education nationale donnant des moyens en postes d'enseignant et une personne chargée de la coordination. Selon Christian Terras, "le lycée de la nouvelle chance préfigure un peu le futur. Car le public scolaire change. Il porte déjà en lui la réalité des difficultés économiques et sociales tout en souhaitant acquérir des diplômes, certains travaillent le soir comme homme de ménage ou au Mac Do. Ceci nous porte vers des formes d'alternance, vers une remise en question". D'ores et déjà, il imagine la multiplication des lycées de la nouvelle chance dans l'académie au sein d'autres filières plus industrielles. Source : "Le lycée de la nouvelle chance" / Agnès Benoist in Lyon Figaro, 13 janvier 2003, p. 2.

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