[La Ferme de Lhopital à Saint-André-de-Corcy]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRPT0180 03
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 12,5 x 17,5 cm (épr.)
description Adresse : Lieu-dit Lhopital, 01390 Saint-André-de-Corcy (Ain).
historique La terreur des marchés a un nom : Christine Bouffard. Un petit bout femme de 34 ans, hargneuse comme dix roquets dès lors qu'il s'agit de défendre des animaux maltraités. Cette écologiste à tout crin va d'ailleurs recevoir un diplôme du mérite des mains du président de l'Oeuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs, une association parisienne qui harcèle les "bourreaux" d'animaux. Ces lauriers, Christine Bouffard les a glanés sur le marché de La Croix-Rousse. La veille de Pentecôte, elle tombe en arrêt sur un marchand de volailles qui emballe une poule vivante dans un sac plastique. Les pattes attachées et la tête en bas. Flagrant délit : l'infraction relève de l'article 7 du chapitre premier de l'annexe 2 d'un arrêté d'octobre 1982. Sainte Christine, n'écoutant que son coeur brimé, va à l'abordage. Elle harangue l'indélicat vendeur. "Va t'en faire ta soupe", lui répond-t-il. C'en est trop. Christine Bouffard en fait-son affaire. Durant huit mois, elle va harceler la direction des services vétérinaires et la mairie de Lyon. "Tous les jours, j'ai téléphoné à l'inspecteur chargé des halles et marchés. Ca n'a servi à rien, mais ils pensaient que je me lasserais". C'est mal connaître cette ancienne infirmière. Elle s'associe avec une ancienne professeur de faculté de soixante-cinq ans rencontrée à La Croix-Rousse. "Tous les jours, elle surveillait ce marchand de volailles. Elle a pris des photos au télé-objectif". Du coup, preuves à l'appui, l'équipée sauvage luttant pour une fin décente des poulets, dépose plainte au commissariat. Le procureur de la République est saisi. Aux dernières nouvelles l'instruction du dossier est toujours en cours. Des histoires comme celles-ci, il en arrive presque tous les jours à Christine Bouffard. La dernière en date n'est pas triste... Sur une petite route départementale, elle se retrouve derrière un camion transportant des chevreaux. Son sang ne fait qu'un tour : elle sent l'anomalie, double le convoi, ne regarde plus la route... la scène se finit dans le fossé. "Je me suis fait traiter de tous les noms d'oiseaux", dit-elle. "J'ai perdu ma voiture mais je ne regrette rien. Quand on maltraite les animaux, c'est plus fort que moi". En ce moment, ses deux grands chevaux de bataille sont l'élevage en batterie et surtout "l'euthanasie des poissons"... Christine Bouffard vient d'ailleurs de marquer des points dans ce nouveau combat. Le directeur d'un grand magasin vient de lui écrire pour l'assurer que toutes les carpes et tanches ne seront plus déposées vivantes sur les bancs de glaces. Dorénavant, elles seront électronarcosées. "Un poisson qui a souffert 48 heures n'est pas bon. C'est pour ça d'ailleurs qu'il faut éliminer ces loteries d'animaux vivants. Vous vous rendez compte qu'ils emballent les truites pêchées vivantes !". Curieusement, Christine Bouffard ne s'est pas attirée trop d'ennemis avec tous ces combats. "Il n 'y a pas très longtemps, un président de chasse est venu me voir pour discuter de nos problèmes. Vous allez rire, mais il rampait devant moi". Au coeur du litige, un faisan qui croupissait dans une cage avec une "énorme plaie crânienne". Les chasseurs, doux euphémisme, ne sont pas appréciés à Lhopital, ce lieu-dit situé à une poignée de kilomètres de Saint-André-de-Corcy. C'est ici que vit la famille Bouffard. Une fermette où gambadent en toute liberté chevaux, chèvres, poules, corbeaux, chats et chiens. Tous ont un passé d'éclopé derrière eux. Ou de miraculé, comme cette vieille jument grise de 29 ans sauvée in extremis de la boucherie et ces chèvres qui n'en finissent plus de se remettre d'une bronchite en phase terminale. Même si le chat n'a que trois pattes, le corbeau une seule aile ou le mouton un gigot en moins, tout ce petit monde se porte merveilleusement bien. La mieux lotie apparemment reste Sidonie, une vieille poule grasse comme un cochon. La mascotte de la maison, celle-ci. "Elle fait la loi même avec les chiens puisqu'elle arrive à les chasser de leur plat". Evidemment cette passion lui coûte une véritable petite fortune. "Je n 'ai jamais osé calculer à combien me revenait le vétérinaire, mais je peux vous dire qu'on ne fait aucune folie. Pas de vacances, pas de sorites, pas de fringues, pas de maquillage". Même la viande n'a le droit de cité qu'une fois par quinzaine au menu des Bouffard. "Il ne faut pas trop tirer sur la ficelle, mon mari aime bien en manger tout de même. C'est un homme en or, vous savez. Avant de me rencontrer il ne connaissait rien aux animaux. Depuis que je l'ai emmené voir une ouverture de chasse, il a beaucoup réfléchi". Source : "La mère poule des basses-cours" / Pierre Perret in Lyon Figaro, 10 avril 1989, p.44.
note à l'exemplaire Négatif(s) sous la cote : FIGRP00972.

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