Ardent pacifiste et ancien militant socialiste, Steinlen va néanmoins, au cours de la première guerre mondiale, mettre son art au service de l’ « Union sacrée » française. Parmi une œuvre graphique abondante au cours des années 1914-1918 se détache cette affiche réalisée pour la promotion [...]
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Ardent pacifiste et ancien militant socialiste, Steinlen va néanmoins, au cours de la première guerre mondiale, mettre son art au service de l’ « Union sacrée » française. Parmi une œuvre graphique abondante au cours des années 1914-1918 se détache cette affiche réalisée pour la promotion d’une journée caritative au profit de la Serbie. Attaquée en octobre 1915 par trois groupes d’armées allemandes et autrichiennes, l’armée serbe est contrainte à la fuite. Les populations civiles doivent également subir la fuite, l’exil et des exactions dont se rendent notamment coupables les troupes hongroises et bulgares. Une quête est organisée par le Secours national français en juin 1916 et pour laquelle seront imprimées une affiche de texte et trois affiches illustrées. Tirée à 50.000 exemplaires, l’affiche de Steinlen montre un soldat français reconnaissable à son uniforme bleu horizon et son képi de couleur garance, sur l’épaule duquel s’appuie un soldat allié serbe aux traits émaciés par la faim. Derrière les deux personnages principaux s’étend la colonne des réfugiés serbes, principalement des femmes et des vieillards. Peinture d’un exode aux accents bibliques, on y retrouve l’empathie caractéristique de l’artiste envers le petit peuple et ceux qui souffrent. Dans son éditorial du 27 juin 1916 pour « L’Humanité », Victor Snell écrit « Or, c’est dans ces deux figures émouvantes jusqu’aux larmes que s’affirme, avec une intensité jamais dépassée, la sensibilité et la maîtrise de Steinlen […] ce n’est pas le conventionnel « poilu », puissant et hilare, qu’on voit dans les journaux illustrés et les revues de café-concert, mais un soldat, un vrai, qui n’est pas qu’un uniforme mais qui est un homme ». La lithographie est réalisée dans des teintes sombres, ce qui renforce la dramaturgie de la scène. Seule note de couleur avec la lettre typographique, le képi du soldat français attire le regard. Le spectateur doit-il y voir, grâce au soutien militaire français et celui de son don éventuel, l’ultime espoir du peuple serbe ?
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