Rabelais à Lyon
François Rabelais séjourne à Lyon entre 1530 et 1535 mais il y revient épisodiquement tout au long de sa vie. En effet, Lyon a une position géographique avantageuse, entre Paris et l'Italie, et c'est aussi un centre intellectuel, où Rabelais fréquente des humanistes, ainsi qu'un centre économique, connu pour ses foires et son intense activité dans le secteur de l'imprimerie.
Dans l’atelier de Sébastien Gryphe
Lorsque François Rabelais est nommé médecin de l’Hôtel-Dieu le 1er novembre 1532, il est déjà installé dans la ville depuis quelques mois. Correcteur chez l’imprimeur humaniste Sébastien Gryphe, Rabelais y fait aussi publier des textes entièrement revus, traduits et commentés des grands médecins de l’Antiquité tels les Aphorismes d’Hippocrate et l’Art médical de Galien.
Dans le domaine du droit antique, il participe à l’édition du testament de Cuspidius et joint une épître liminaire qu’il adresse au légiste Amaury Bouchart.


Rabelais se passionne également pour l’archéologie antique lors d’un voyage à Rome effectué en 1534 en tant que médecin personnel de l’évêque Jean Du Bellay et il écrit à son retour une épître liminaire dans un ouvrage consacré à l’archéologie romaine : la Topographia antiquae Romae de Johannes B. Marliani.
Maître Alcofribas Nasier
Parallèlement à ces travaux de philologue et de savant, Rabelais écrit sous son pseudonyme d’Alcofribas Nasier – l’anagramme de son nom – la chronique farcesque du géant Pantagruel, sur le modèle des chroniques populaires qui connaissaient alors un grand succès de librairie, en particulier lors des périodes de foire. Pantagruel parait chez Claude Nourry, imprimeur lyonnais installé non loin de l’actuelle place des Jacobins, en 1532. Encouragé par le succès de ce roman, Rabelais fait paraître Gargantua chez le successeur de Nourry, François Juste, en 1534.

Le nombre de rééditions de ces romans, souvent publiées chez d’autres imprimeurs et sans l’accord de l’auteur, témoigne du succès de ces récits à la fois populaires, satiriques et empreints de l’humanisme médical de François Rabelais. Il en va ainsi des éditions d’Etienne Dolet parues en 1542, sans l’accord de Rabelais qui venait de faire paraître chez François Juste une édition remaniée – moins virulente à l’égard des autorités religieuses telle la Sorbonne – de ces chroniques gigantales.
L’attachement à l’imprimerie lyonnaise
Rabelais quitte subitement Lyon le 13 février 1535. Après l’affaire des placards, il fuit une répression catholique menée contre les luthériens mais aussi contre les évangéliques, courant progressiste du catholicisme que Rabelais soutient et défend dans Gargantua. Néanmoins, si le Tiers Livre parait à Paris en 1546, c’est à Pierre de Tours, successeur de François Juste, que Rabelais remet les 11 premiers chapitres du Quart Livre en 1548, lors d’un passage à Lyon. Rabelais, qui signe désormais de son vrai nom, dispose alors d’un privilège royal censé le prémunir contre les éditions contrefaites ou les imitations de ses chroniques, mais leur nombre ne diminue guère, témoignant encore du succès des aventures de Pantagruel.


Alors que Rabelais meurt à Paris en 1553, c’est encore à Lyon que parait une des premières éditions du Cinquième Livre (1), suite et fin posthume des aventures de Pantagruel et de ses compagnons, en 1565.
(1) L’exemplaire conservé à la Bibliothèque Municipale de Lyon a été relié au 17e siècle avec Le Voyage et navigation des isles incongneuës par Bringuenarille cousin germain de fesse pinte, contenant choses merveilleuses et difficiles, pastiche de Rabelais dont il ne reste plus qu’un seul exemplaire connu.