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    L’Heptaméron de Marguerite de Navarre, un exemplaire lyonnais

    Issu de la plume fertile de Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre, l’Heptaméron, recueil de nouvelles amoureuses et galantes, fait partie des œuvres emblématiques de la renaissance française. Parmi les trésors conservés à la Bibliothèque municipale de Lyon, une édition de 1571 ayant appartenu à Anne Spon, épouse d’un notable lyonnais, qui laissa son empreinte personnelle sur cet exemplaire. Un ouvrage qui nous offre l’opportunité de revenir sur une œuvre littéraire souvent méconnue, à travers l’existence de deux femmes du XVIe siècle.

    Marguerite de Navarre : reine et femme de lettres

    Marguerite de Navarre , portrait par Jean Clouet (vers 1530)

    Sœur bien-aimée de François Ier, reine du petit royaume de Navarre par son mariage, en 1527, avec Henri II d’Albret, elle est également la grand-mère maternelle du futur Henri IV. Elle joua un rôle important dans l’essor de la culture de la Cour de France, que ce soit à Paris, dans les châteaux du Val de Loire, ou encore en Navarre.

    Diplomate née, elle seconde et représente brillamment son frère qui la missionne dans les cours étrangères, notamment à Madrid auprès de Charles Quint, grand rival du roi de France.

    Mécène bienveillante, elle protègera des hommes de lettres tels que Rabelais ou Clément Marot qui la décrira en ces termes : « corps féminin, cœur d’homme, tête d’ange ». Poétesse accomplie, on lui doit également des recueils de poésie religieuse tels que Le miroir de l’âme pècheresse.

    Esprit religieux ardent et inquiet, la reine de Navarre soutiendra notamment le mouvement évangélique qui amorçait les débuts d’un renouveau religieux et ce, au détriment des autorités religieuses qui voyaient d’un mauvais œil ces pratiques qui allaient déboucher sur la Réforme. Marguerite n’échappera elle-même aux poursuites de la Sorbonne, redoutable autorité de censure de l’époque, que grâce à la protection de son frère.

    C’est dans les dernières années de sa vie, alors qu’elle vivait désormais retirée sur ses terres de Navarre, que prit forme sous sa plume ce qui allait devenir l’Heptaméron. Une œuvre qui restera malheureusement incomplète, Marguerite étant décédée en 1549 avant son achèvement.

    Aux sources de l’Heptaméron

    C’est dans l’œuvre de Boccace (1313-1375) et plus particulièrement son Décaméron, que Marguerite va puiser son inspiration pour donner naissance à l’Heptaméron. Au XVIe siècle l’œuvre de Boccace rencontre un grand succès auprès de l’aristocratie cultivée. Toute bibliothèque princière se devait d’avoir un exemplaire du Décaméron. Au point qu’à la cour de France on instaure un nouveau passe-temps : raconter des histoires devant un auditoire qui s’attachera ensuite à débattre de leur contenu. Un procédé qui reproduit l’ambiance courtoise et raffinée de l’ouvrage de Boccace et que Marguerite s’attachera à reproduire dans son œuvre.

    Histoires au contenu galant, voire leste (on a souvent vu en l’Heptaméron un recueil de gauloiseries), mais aussi récits d’amour courtois loin des supposées grossièretés rabelaisiennes d’un XVIe siècle que l’on réduit trop souvent à cette image, l’Heptaméron est surtout le reflet d’une société aristocratique et de ses codes moraux.

    Un exemplaire lyonnais

    C’est en 1558, soit neuf ans après la mort de Marguerite, que sortit des presses parisiennes une première édition de l’œuvre de Marguerite de Navarre, sous le titre Histoires des amans fortunez. Une version anonyme et surtout très incomplète mais qui sera suivie, un an plus tard, d’une nouvelle édition, enrichie et beaucoup plus ordonnée, que l’on doit à Claude Gruget, ancien valet de chambre de Marguerite qui lui attribuera son titre définitif : l’Heptaméron.

    Lugdunum, série "Théâtre des cités du monde", [s.d. 1575] (BmL, Rés 5133)

    Parmi les possesseurs de cette édition de 1559, rééditée en 1571, figure la femme d’un riche commerçant lyonnais, Anne Spon, dont il ne reste aujourd’hui guère de trace. Nous savons néanmoins qu’elle est la fille de Mathieu Spon, négociant originaire de la ville d’Ulm dans le sud de l’Allemagne, qui s’installera à Lyon au milieu du XVIe siècle où il prospèrera dans la banque et le commerce. Sa femme, Pernette Lullin-Pollier, est de son côté issue d’une vieille dynastie genevoise.

    Leur fille épousera à son tour un négociant originaire de Zurich et installé à Lyon, Vincent Clée. A signaler que l’Allemagne et la Suisse étant deux pays où la Réforme s’était solidement implantée, on peut supposer à juste titre que la famille Spon appartenait à la religion protestante.

    Un ouvrage révélateur de son possesseur ?

    Que nous dit cet exemplaire de l’Heptaméron que possédait Anne Spon ? Sans nul doute cet ouvrage n’était pas un simple objet de luxe dont on fait étalage pour affirmer sa fortune et son rang. Il est en effet bien trop marqué par la personnalité et la sensibilité d’Anne Spon pour être un simple livre-objet dont on fait parade. Il nous révèle au contraire la vie intime et spirituelle d’une femme ayant le goût des Belles-Lettres et des choses de l’esprit.

    Ainsi, ce témoignage émouvant que l’on trouve sur la reliure, sa devise : « Amour et Force. Souffrir et souvenir. Plus penser que dire. ». Devise toute empreinte d’une philosophie et d’une conduite quasi-stoïcienne où l’on s’exhorte au courage et à la dignité face aux aléas de l’existence.

    Devise d'Anne Spon : "Anne Spon, Amour, Force"

    Devise d'Anne Spon : "Souffrir et souvenir, plus penser que dire""

    Quant au « Plus penser que dire », au-delà d’une règle de vie, il peut aussi être interprété comme un appel à la prudence pour une personne appartenant, possiblement, à la Réforme et donc amenée à pratiquer sa religion de manière discrète.

    Autre témoignage que nous a laissé Anne Spon, sur la page de garde de l’ouvrage, son ex-libris manuscrit encadré de cette phrase : « Je suis à Anne Spon, en ta vertu mon regard ». Devise qui laisse encore une libre interprétation. De quel regard parle-ton ? Celui d’Anne ? Peut-être celui de Dieu ?

    Ex-libris manuscrit d'Anne Spon en page de garde "Je suis à Anne Spon, en ta vertu mon regard"

    Le reste de l’ex-libris est pour le moins sujet à interprétation. On y voit un cœur enflammé et ailé accompagné d’initiales énigmatiques A, V (ou U), F. Qu’est-ce qui se cache derrière ces lettres ? Les initiales d’une personne ? L’abréviation d’une citation ? Le mystère demeure.

    L’Heptaméron est devenu au fil du temps une œuvre phare d’un XVIe siècle qui n’avait pas encore été ébranlé par les guerres de religion. Né de l’esprit d’une personnalité aussi brillante qu’attachante, cet ouvrage est aussi le reflet d’une époque et d’une société dont les codes et les valeurs bousculent et dépaysent le lecteur moderne.

    Quant à l’exemplaire d’Anne Spon, il est devenu un miroir révélateur de la personnalité et de la vie intérieure de sa détentrice. Dernier vestige d’une existence désormais effacée, il est aujourd’hui conservé à la Bibliothèque municipale de Lyon, parmi d’autres trésors.

    Pour aller plus loin :

    Marguerite de Navarre, L’Heptaméron, édition critique par Renja Salminen, Droz, Genève, 1999.

    Jean-Luc Déjean, Marguerite de Navarre, Fayard, 1987.

    Gisèle Mathieu-Castellani, La conversation conteuse : les nouvelles de Marguerite de Navarre, PUF, Paris, 1992.

    Lucien Febvre, Amour sacré, amour profane : autour de l’Heptaméron de Marguerite de Navarre, Gallimard, Paris, 1944.

    Pour citer cet article

    Référence électronique

    Guillaume Joly, L’Heptaméron de Marguerite de Navarre : un exemplaire lyonnais, numelyo [en ligne], mis en ligne le 2017-10-06T12:35:56.848Z, consulté le 2024-04-24 09:48:28. URL : https://numelyo.bm-lyon.fr/BML:BML_00GOO01001THM0001heptameron

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