[Le Transbordeur. Visite de chantier]

[Le Transbordeur. Visite de chantier]
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localisationBibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRPTP0610A 04
technique1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 18 x 24 cm (épr.)
descriptionDe gauche à droite : Victor Bosch, futur directeur du Transbordeur (1989-2010) ; Bernard Pavy, ingénieur en chef de la Ville de Lyon ; Yves Martin, architecte de la Ville de Lyon.
historiqueC'est vrai, il y avait presque longtemps que ça n'était pas arrivé et cette fois, elle fut publique et spectaculaire la grosse colère de Francisque Collomb qui, le 18 novembre 1988, avait dans le collimateur le ministère de la Culture et son représentant André Mure. Objet du litige, le rock. Comme la chose se passait un jour faste, un jour où tout le monde n'avait qu'à se féliciter de l'opération salle-rock usine-des-eaux, on n'ose imaginer la teneur du débat lorsque l'atmosphère est moins détendue. Tout avait pourtant bien commencé. Le 18 novembre donc, au brouillard levant, une armée d'experts, d'adjoints et de techniciens s'était déployée sur le site de l'ex-usine des eaux. Une visite organisée de chantier, en somme, inscrite très exactement à deux mois de l'ouverture de la salle rock. Celle qui n'a pas encore de nom, celle qu'on dit petite au regard de la future grande de Chassieu. Ainsi, à cinq mois des municipales, il apparaît clairement que le maire de Lyon est sur le point de remplir le contrat rock qui le liait à ses électeurs de 1983. En une année seulement, le dossier et la réalisation de cette petite salle auront été bouclés, verrouillés, bétonnés. Les volumes sont superbes, l'architecture industrielle respectée, le confort assuré, l'acoustique itou. Exclusivement financée par la ville de Lyon et exécutée par les services techniques municipaux, l'aventure est exemplaire. De cet endroit et dès l'origine, André Soulier a fait son affaire : sur une enveloppe de 9,5 millions de francs à respecter absolument, il a missionné Victor Bosch tandis que Jean-François Mermet, l'adjoint aux Travaux s'appuyait sur Bernard Pavy des services techniques qui, lui, choisissait dans l'équipe un jeune architecte, Yves Martin. Sur le terrain, le trio Bosch-Pavy-Martin s'est révélé infernal. On a vu des fournisseurs. remballer leurs matériaux pour cause de non conformité avec les adjudications signées, on se souvient de malfaçons sur lesquelles personne ne fermait les yeux jusqu'à ce que réparation soit faite et tout à l'avenant. Presque une révolution. Cette salle, c'est leur bébé et ils en ont maîtrisé chaque chromosome. "Une salle rock, c'est rait pour entendre, voir et respirer", parole de Victor Bosch qui, avec Yves Martin, a cultivé tout l'aspect paquebot de l'ensemble avec une salle club, un bar, plusieurs ponts, des passerelles techniques coulissantes aux plafonds et la grande salle modulable de 400 à 1500 places avec des gradins à laisser tels quels, à meubler de bancs ou de sièges en coques selon le type du concert. Amarré sur le boulevard Stalingrad, ce drôle de navire sera sans doute baptisé du nom de Transbordeur. A son bord, le rock d'abord, avec des groupes nationaux, étrangers ou régionaux, d'autres formes d'expression artistique aussi, à commencer par la danse puisque Régine Chopinot semble avoir déjà son ticket. Pour les soirées inaugurales, sont avancés les noms de William Sheller, Talk Talk, New Order, Brian Ferry, Kim Wilde, Front 242 et tous ces noms, c'est Victor Bosch, aspirant capitaine, qui les aligne. Le fait est là, à deux mois de l'ouverture le directeur du lieu n'est toujours pas nommé, mais lorsque André Soulier parle de direction unique et de haute probabilité mathématique sur le nom du bon vieux rocker Bosch, on se dit que rien n'est perdu et que jusque dans son aboutissement cette aventure professionnelle pourrait se vivre avec panache. On en était là le 18 novembre, lorsque, entamant l'état des lieux du rock à Lyon horizon 89 avec salles de répétition et Transbordeur, Francisque Collomb évoqua le grand projet de Chassieu, celui pour lequel : "Nous attendons toujours l'argent du ministre pour commencer les travaux. Je ne sais pas si monsieur Mure va obtenir de celui là l'argent promis par François Léotard, mais il ne faut pas nous prendre pour des guignols !" André Mure, chargé de mission auprès de Jack Lang et qui n'entendait pas non plus passer pour un Guignol laissa plus qu'entendre que si la Sepel avait fait son boulot, le premier coup de pioche aurait été frappé depuis longtemps. En tant qu' "interprète" de la pensée ministérielle, André Mure a parlé d'une salle prototype dont Chassieu pourrait avoir la primeur hexagonale à condition qu'on veuille bien en étudier les modalités ici et maintenant. Alors là, le sang du maire n'a fait qu'un tour : "On ne va pas faire du 10.000 places rien que pour faire plaisir au ministre et si l'Etat ne veut pas nous donner les dix millions promis, je ferai la soudure. Mais, dans ces conditions, je dirai que c'est nous et pas l'Etat qui avons fait le travail." C'est fou ce qu'on swingue en politique depuis que le droit de vote a été accordé aux jeunes de dix-huit ans. Source : "Et rock la galère" / Sophie Bloch in Lyon Figaro, 19 novembre 1988, p.1 et 63.

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