[Chantier du Parc de stationnement République (LPA)]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0740 FIGRPTL0185 06
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 18 x 24 cm (épr.)
description L'artiste Serge Boyer face au démontage de son oeuvre.
historique "Les Grands Compas", sculpture-fontaine de Serge Boyer, 1977 (démontée en juin 1993). Oeuvre réinstallée au second semestre 1996 sur la Place de la Compas-Raison (Lyon 9e).
historique Les travaux du parking de la place de la République nécessitent de la recouvrir d'une couche de béton armé. Le sculpteur, concepteur de l'ensemble, crie à la défiguration de son oeuvre. "On nie la mémoire".
historique "Je représente la mairie de Lyon et j'exige que soit enlevée cette sculpture", ordonne Jacques Oudot, adjoint à la Culture. "Et moi, je suis le sculpteur et je veux qu'elle reste là", hurle Serge Boyer. Le 19 janvier 1991, la place de la République avait les allures d'un champ de bataille. L'enjeu du conflit : déplacer les blocs de pierre placés sur un "territoire annexé par des esprits dictatoriaux", insiste l'artiste. En clair, la mairie souhaite installer des machines outils pour les travaux d'un parking au milieu de l'oeuvre. Scellée en 1976, sous le regard circonspect des riverains, la sculpture-fontaine avait alors défrayé la chronique, loin de faire l'unanimité des critiques artistiques. Et des contribuables pour lesquels l'art avait un prix : 200 millions de centimes. Le 19 janvier, une couche de béton armé devait être coulée pour permettre de renforcer le sol et de creuser le parking. L'adjoint à la Culture avait pris soin d'inviter le sculpteur à "la cérémonie de début des travaux"... Mais, surexcité, un lourd dossier sous le bras, l'artiste lyonnais menace de se coucher sous la grue "meurtrière", pour éviter "l'amputation de mon oeuvre". Boyer a conçu un espace dans sa totalité. Sculptures et fontaines. Le sol en granit et ardoise, tout comme la végétation, étaient parties intégrantes du Grand compas et de l'Equerre. Jusqu'aux bancs, pensés comme des lieux de rencontre et de communication. "Tronçonner mon travail, c'est nier la mémoire et réduire le témoignage de toute une époque. C'est aussi dramatique que si on enlevait les colonnes de Buren. En plus, je n'ai pas été prévenu", accuse-t-il. "Faux" répond Jacques Oudot : "J'ai organisé une rencontre le 9 janvier. Tout le monde était d'accord. Aujourd'hui, Boyer fait un scandale. Ce n'est pas parce qu'il est sculpteur qu'il doit prendre en otage toute une ville". L'adjoint semble avoir fait des propositions intéressantes à l'artiste : "Je lui ai proposé d'organiser un concours pour aménager la place pendant la durée des travaux et la remettre en l'état après. Ensuite, je lui ai promis de stocker la partie que l'on doit enlever dans un atelier, à Vaise. J'ai même été jusqu'à suggérer de la laisser pendue à une grue. Mais là, les ingénieurs ne voulaient plus travailler". Manque de sécurité évident. Mais cette petite guerre locale ne touche pas tout le monde. Henriette, la fleuriste, ne s'inquiète pas outre mesure. "C'est vrai que personne ne m'a prévenu. J'ai vu par hasard sur un plan que les camions traverseront mon étalage pour accéder aux travaux." Philosophe, Henriette traversera la rue et s'installera en face. "Je suis là depuis treize ans et c'est pas cela qui me fera partir", conclue-t-elle. Aujourd'hui, si Jacques Oudot se déclare "refroidi, mais encore ouvert", l'artiste en appelle à la justice. "Je transmets le dossier à mon avocat. Ils n'ont rien compris à la symbolique ésotérique et phallique de mon oeuvre qui compte cent huit pierres comme les amants de Pénélope, mais je la défendrai jusqu'au bout". Avant de conclure, amer : "En fait, ils en avaient marre de voir des gens se faire taper un franc. Ils veulent faire de la place un lieu de passage. J'en avais fait un lieu de spectacle". Source : "L'art perd sa place" / Philippe Courtois in Lyon Figaro, 19 janvier 1991, p.5.
note à l'exemplaire Négatif(s) sous la cote : FIGRP03288.

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