[Biennale de la danse de Lyon (1992)]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRP05544 002
technique 1 photographie négative : noir et blanc ; 36 x 24 mm
historique Dès le matin, déjà, ils étaient bien plus nombreux que d'habitude à passer le pont, pour voir, sur le parvis de Saint-Jean, les sardanes dansées au sortir de la grand'messe aux sons des clarines. L'après-midi, on ne les comptait plus entre Saint-Georges et Saint-Paul. Il y avait ceux venus exprès pour, qui attendaient. Et ceux qui étaient là par hasard (si, si, il y en avait), qui se doutaient bien qu'il se tramait quelque chose, et qui attendaient également. Au bout du compte, il y avait beaucoup de monde. A terroriser un anachorète. Et l'après-midi, c'était pire. Les Lyonnais ont en effet répondu en masse à l'invitation de la feria que la Biennale de la Danse et les commerçants du quartier leur avaient lancée. Le soleil était comme prévu de la partie. Comme Guy Darmet qui s'était lui aussi rendu sur place et brillait de tout l'éclat d'un vêtement à l'espagnolisme très stylisé (hormis la chemise à pois). Dès 15 heures, une transhumance de tous âges, et de tous looks, et qui n'était pas sans créer des engorgements inquiétants, se répandait dans les ruelles du Vieux Lyon. A 18 heures, ils en affluaient encore. Le problème étant alors que les premières vagues n'ayant pas encore regagné leurs pénates, le Vieux-Lyon menaçait franchement d'exploser... mais dans la joie et dans la bonne humeur. Des familles en rupture de parc de la Tête-d'Or aux assidus de la Biennale, des enfants juchés sur les épaules de papa aux chiens-chiens portés dans les bras, en passant par des touristes, des vrais, tous, ils étaient venus là pour badauder quelques heures et voir ce qu'il y avait à voir aux sons des chants et des danses espagnols promis. Ça et là, quelques relents jazzies, et même un accordéoniste défendant le répertoire national titillaient les oreilles, mais dominait, impérial, le flamenco. Un peu engourdies au début, les mains et les pieds se déliaient peu à peu. L'ambiance se chauffait avec bonhommie... Comme si le quartier se mettait en condition pour le grand bal du soir, quai Romain-Rolland. Certains avaient joué le jeu du costume, et arboraient qui, des fleurs dans les cheveux, qui, des robes gitanes, ou des mantilles, ou simplement des rouges et des noirs... Dans les bars, on s'était fendu d'un breuvage qui dans le meilleur des cas avait le goût de la sangria, mais on n'était pas allé jusqu'aux bières espagnoles. On pouvait en revanche trouver de la paella au verre (!). Et de la barbe à papa, et des pommes d'amour, comme à la vogue, parce que c'était la fête. Les merguez, aussi, étaient au rendez-vous. Ouf, on n'avait pas perdu tous nos repères. En milieu d'après-midi, il n'y avait plus une seule place aux terrasses. Plus un seul bout de banc libre place du Change. Plus une seule place dans les rues. A peine un pavé où poser le pied. Restait, toujours possible, la solution de se réfugier dans les magasins, tous très largement ouverts, de l'épicier au bouquiniste, de la galerie d'art au fleuriste. Mais c'était rater le spectacle. Ses organisateurs peuvent s'en réjouir. Cette première feria a connu un succès populaire total. Mais quelle vision apocalyptique ! Celle d'un Vieux-Lyon envahi jusqu'à l'asphyxie par la foule. Une vision dont on a envie qu'elle demeure liée à la fête, à la liesse. Et qu'elle reste aussi l'exception. Source : "L'appel de la feria" / Nelly Gabriel in Lyon Figaro, 21 septembre 1992, p.23.
note à l'exemplaire Ce reportage photographique contient 160 négatifs.

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