[Galerie Le Rectangle : exposition Claude Viallat]

[Galerie Le Rectangle : exposition Claude Viallat]
droitsCreative Commons - Paternité. Pas d'utilisation commerciale. Pas de modification.
localisationBibliothèque municipale de Lyon / P0767 FIGRP12466 002
technique1 photographie négative : couleur ; 24 x 36 mm
descriptionAdresse de prise de vue : "Nouvelles peintures sur tissus Bucol" de Claude Viallat, Centre d'art contemporain Le Rectangle, place Bellecour, Lyon 2e.
historiqueDes dessins, peintures sur papier, collages, empreintes (1968-1990) au Musée d'Art moderne de Saint-Etienne et des pièces historiques à la galerie Confluence(s) de l'IUFM, des "portes" à la galerie Verney-Carron, réalisées entre 1999 et 2000, ainsi que quelques oeuvres monumentales où l'artiste flirte avec le monochrome, et au Rectangle plus de soixante-dix peintures inédites prenant pour support des échantillons de la Maison de soierie lyonnaise Bucol... Pour un artiste qu'on n'avait quasiment jamais vu à Lyon, depuis son entrée dans la carrière artistique, en 1966, on peut appeler cela un rattrapage. Etonnant, d'ailleurs, que Claude Viallat, un des grands peintres actuels, n'ait jamais eu les honneurs des cimaises et des espaces lyonnais, alors qu'il était chez lui à Saint-Etienne, où Bernard Ceysson, dès l'époque de Supports-Surfaces, s'intéressait à lui. En 1974, il lui consacrait une exposition qui fut la première monographie de l'artiste dans un musée. Nous, c'est plutôt Buren que l'on a accompagné depuis plus de vingt-cinq ans. Chacun ses choix. Bouchées doubles, donc, pour évoquer sur toute sa passionnante histoire, une oeuvre placée sous le signe de la fidélité et de la liberté. La sensualité, triomphante aujourd'hui, est venue plus tard... Tout commence à la fin des années soixante, dans un militant et contestataire contexte artistique. Claude Viallat (né à Nîmes en 1936) après avoir, comme tout le monde, appris son métier de peintre aux Beaux-Arts (Montpellier, puis Paris), et peint, comme beaucoup, des natures mortes académiques, remet en question cet enseignement, la conception du tableau et de la peinture qu'il sous-entend, le métier qui l'accompagne. Dès 1966, il trouve, par hasard, dit-il, cette forme non symbolique, non décorative, qui va devenir son empreinte sur la toile. Une manière de signature auquel il est toujours fidèle. Dès l'année suivante, il abandonne le tableau de chevalet pour explorer les possibilités d'une toile libre dans l'espace, sans recto ni verso. Ses expérimentations propres et les réflexions qu'il partage avec Daniel Dezeuze et Patrick Saytour donneront naissance en 1970 au groupe Support/Surface, lequel ramène l'oeuvre d'art à sa réalité matérielle, ses composants étant mis en valeur au de triment de la représentation. Le tableau disparait comme lieu d'une mise en scène pour réapparaître dans sa physicalité pure de support et de surface. A l'IUFM, outre des toiles libres marquées de l'anodine mais désormais célèbre empreinte au pochoir, on peut voir notamment des oeuvres de cette période, à savoir un travail dans l'espace et avec l'espace réalisé à partir de cordes, de noeuds, de filets, basé sur l'expérimentation des possibilités du matériau à travers l'enroulement, l'extension, la tension. Support/Surface défunt, Viallat écrira bien d'autres chapitres aux aventures triangulaires du support, de la peinture et de la forme. Avec toujours plus de diversité et de liberté dans le choix du support, bâches, toiles de tente, toiles cirées, draps, sacs de jute, parasols... Toujours des tissus usagés, de nature utilitaire et plutôt d'extraction populaire. Avec toujours la répétition réglée de la forme à l'intérieur de l'espace, marquage du temps autant que rythme de la composition. Une contrainte dans laquelle le peintre a trouvé le chemin de sa liberté. Avec toujours plus de sensualité et, semble-t-il, de plaisir, dans l'utilisation de la couleur. Rouge, bleu, jaune, vert... Aux premières couleurs, limitées, sans recherche d'effet, et posées le plus impersonnellement du monde, va succéder un balthazar de teintes qui affirmera Claude Viallat comme le plus grand coloriste de sa génération. De raboutage en pétassages, entendez de fragments ajustés en fragments rapiécés, son oeuvre plutôt minimale, austère, pour ne pas dire rigide en ses débuts, s'est épanouie dans des formes inattendues, dans des harmonies ou des dissonances colorées frisant parfois la luxuriance. C'est ce coloriste que l'on retrouve chez Verney-Carron, où ses "portes" posent avec humour la question du cadre, et surtout au Rectangle, où l'habitué des tissus modestes, l'amoureux des étoffes grossières qui ont vécu et qui le montrent, a dû oeuvrer sur la noble soie. Surmontant un a priori vis-à-vis de ce tissu qui, avoue-t-il, le "réfrigérait", Viallat a questionné comme il l'aurait fait avec des vulgaires mousselines de vogue la question du bon et du mauvais goût. Forme contre motifs, qu'en est-il du kitsch, ou du statut de la beauté quand les couleurs de la peinture provoquent un peu rudement les ramages du tissu, ou créent, au contraire, comme un écho à un fond uni ? Comment travailler la charge émotionnelle particulière de la soie, son élégance, sa sensualité charnelle ? Surenchérir dans l'enrichissement est souvent la réponse que l'artiste apporte dans son art. Il fait de même ici tout en variant subtilement la densité de ses réponses. La rencontre, à l'évidence, évite le conflit grâce à une dialectique habile. Pas de tensions dans ces oeuvres. Une beauté qui transcende leurs composants. La peinture dans tous ses éclats. On pourra, dans ce qui est tout de même une sorte de défi, ne voir qu'un jeu de matières, qu'un exercice de plus, alors que justement, nous semble-t-il, ce travail s'inscrit logiquement dans le processus d'expérimentation des supports qui est celui de l'artiste. On pourra, avec plus de raison, regretter la dimension, timide la plupart du temps, des échantillons fournis à l'artiste. On pourra souligner, quel truisme, que Viallat est toujours Viallat et qu'il ne nous surprend pas. Mais en a-t-il envie ? On ne pourra pas, sans quelque mauvaise foi, nommer redites ses répétitions. A l'intérieur d'un système formel posant de strictes limites, l'artiste a su développer une réponse plastique qui demeure fidèle à elle-même tout en se renouvelant. Signe d'une belle liberté. Source : "Beau comme un Viallat" / Nelly Gabriel in Lyon Figaro, 4 octobre 2000, p.28.
note à l'exemplaireCe reportage photographique contient 20 négatifs.

Retour