[Ancienne usine d'incinération de Gerland]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0758 FIGRPTL0054 01
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 18 x 24 cm (épr.)
historique Deux mille cent tonnes de métaux, ponts roulants, fours, chaudières, trémies, tuyauteries, ferrailles et grappins ont trouvé preneur, le 23 janvier 1991, au cours d'une vente aux enchères organisée dans l'ancienne usine d'incinération de Gerland, Un ferrailleur de Saint-Etienne a finalement déboursé cinq cent vingt-cinq mille francs pour rafler le lot. "Celui-là, chaque fois qu'il vient à Lyon, il prend une pièce au cul", a lâché aussi sec un de ses concurrents lyonnais, qui estimait qu'on aurait dû le payer pour emporter cette épave métallique. "Il aurait fallu au moins trois cents tonnes de cuivre pour se refaire la griotte", a expliqué un acheteur potentiel qui n'a finalement pas poussé les enchères. Ils étaient venus nombreux pourtant pour acheter, de Milan même. Il est curieux d'ailleurs de voir comme les Italiens peuvent être friands de nos tas de ferrailles, puisqu'ils s'étaient déjà rendus acquéreurs du pont de la Boucle. Cette fois, le cahier des charges imposé par la Communauté urbaine de Lyon, propriétaire de l'usine, les a sans doute effrayés... il est vrai "qu'il y avait de quoi en refroidir plus d'un", puisque le ferrailleur qui a décroché ce marché a maintenant trois mois, et pas un jour de plus, pour désosser cette ancienne usine d'incinération. "Mon pote, même à vingt bonshommes, tu le mettras pas par terre en trois mois ce bâtiment". Voilà la réflexion de l'ancien contremaître et responsable syndical de l'usine, Jean-Paul Picout, qui a passé plus de vingt ans de sa vie à entretenir (au marteau-piqueur !) les chaudières et les fours de cette usine. Michel Noir souhaite conserver intacte cette immense bâtisse de 1958, qui n'est que la copie conforme d'une usine d'incinération construite avant-guerre à Saint-Ouen. Les projets les plus fous ont déjà circulé mais les nombreux architectes sollicités n'ont jamais pu se montrer affirmatifs sur une destination précise. Musée, centre artistique, piscine... on verra plus tard. "A mon avis, on se berce d'illusions. Cette usine est mal foutue, il y a très peu de clarté et l'on dépensera un fric fou pour la réhabiliter. Il vaudrait mieux la raser", témoigne un élu qui a été en charge de ce dossier. Sous l'ère Francisque Collomb, on avait raisonné de manière aussi expéditive puisqu'il avait été prévu de créer un parc, du type de celui de la Tête-d'Or, en lieu et place de cet ancien royaume des ordures ménagères. En tout état de cause, cette volonté de conserver les murs n'arrange pas l'affaire de ce ferrailleur stéphanois qui devra rivaliser d'ingéniosité pour extirper deux mille cent tonnes de métal de cette usine infernale sans toucher à l'un de ses murs. Certes, le jeu doit en valoir la chandelle... ces ferrailles représenteraient même une valeur marchande de un million cinq cent mille francs, si l'on en croit un ancien du métier. Ce qui est sûr, c'est que personne à Lyon n'aura un pincement au coeur à voir disparaître ce symbole industriel des années soixante. L'usine d'incinération de Gerland, qui a digéré jusqu'à sept cents tonnes d'ordures par jour, a causé la mort d'un ouvrier, le 1er novembre 1978, et encrassé les poumons de tous les Lyonnais durant plus de trente ans. L'équipement qui a pris la relève de ce monstre aux deux cheminées, à deux pas de là, dans l'enceinte du port Edouard-Herriot, rejette tout de même cent fois moins de poussières et vingt fois moins d'acide chlorhydrique dans l'air... "Cette usine, c'était le bagne", témoigne Claude Rousmans, son ancien directeur. Source : "Conan à l'âge du fer" / Pierre Perret in Lyon Figaro, 24 janvier 1991, p.40.
note à l'exemplaire Négatif(s) sous la cote : FIGRP03311.

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