[Procès Klaus Barbie : le box de l'accusé]

[Procès Klaus Barbie : le box de l'accusé]
droitsCreative Commons - Paternité. Pas d'utilisation commerciale. Pas de modification.
localisationBibliothèque municipale de Lyon / P0901 FIGRPT1005 01
technique1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 15 x 20 cm (épr.)
descriptionDe gauche à droite, sont également présentes dans le box, au côté de l'accusé : les interprètes Isabelle Bonnefond et Carla Dejean (cf. Lyon Matin, 19 mai 1987 et Progrès de Lyon, 19 juin 1987).
historiqueCette photographie anonyme montrant l'accusé dans son box fait partie d'une série de clichés pris lors de l'ouverture du procès Klaus Barbie. Largement diffusées dans la presse, ce seront les rares photographies autorisées dans l'enceinte du Tribunal de Lyon pendant toute la durée du procès.
historiqueLe procès de Nikolaus dit Klaus Barbie s'est déroulé du 11 mai au 4 juillet 1987 devant la Cour d'Assises du département du Rhône, au Palais de Justice de Lyon. C'était la première fois en France que l'on jugeait un homme accusé de crime contre l'humanité. Les charges retenues contre Barbie concernaient trois faits distincts : la rafle opérée à Lyon le 9 février 1943 à l'Union Générale des Israélites de France (UGIF), rue Sainte-Catherine ; la rafle d'Izieu du 6 avril 1944 ; la déportation de plus de 600 personnes dans le dernier convoi parti le 11 août 1944 de Lyon à destination des camps de la mort. Au terme de huit semaines d'audience, Klaus Barbie est condamné le 4 juillet 1987 à la réclusion criminelle à perpétuité. Il décède le 25 septembre 1991 à la Prison Saint-Joseph à Lyon.
historiqueNovembre 1942 : le fringant Obersturmführer Klaus Barbie, 29 ans, s'installe à Lyon, pour y semer la souffrance et le malheur. 11 mai 1987 : le détenu fatigué Barbie, Klaus, 74 ans, entre dans le box des accusés, pour y être jugé. Quarante-cinq ans après, l'heure des comptes a sonné. A partir du 11 mai 1987, et pendant de longues semaines, l'ancien chef de la Gestapo de Lyon va devoir regarder en face une partie de son passé. Moins de deux ans ! Il n'a fallu que 22 mois - de novembre 1942 à août 1944, à ce petit homme aux yeux bleus-gris pour écrire l'une des pages les plus sanglantes de la ville et de la région. Vingt-deux mois seulement pour être le principal maitre d'oeuvre de près de 15.000 incarcérations, 7000 déportations, et 4500 meurtres. Vingt-deux mois seulement pour inscrire en lettres de sang et de larme dans la mémoire collective des noms de villes et de villages : Lyon, Izieu, Saint-Genis-Laval, Bron, Saint-Claude ; d'hommes, de femmes et d'enfants : Jean Moulin, Marcel Gompel, Betty Steigman, Sarah Reifman, Richard Benguigui, Cécilie Last... Ces vingt-deux mois là, Klaus Barbie les a vite oubliés, ou, du moins, ne l'ont-ils jamais empêché de dormir. Tandis qu'aujourd'hui encore une femme de 83 ans pleure ses garçonnets morts il y a 43 ans, lui, dans sa cellule de la prison Saint-Joseph s'astreint à ne pas décliner et garde chevillée à âme l'idéal au nom duquel Il a supplicié l'innocence et écrasé la dignité humaine. Devant les Assises du Rhône, Klaus Barbie ne répondra pas de tous ses crimes. Pour certains, il a déjà été condamné à la peine de mort à deux reprises. Deux jugements qui ne l'ont jamais véritablement inquiété, tant, pendant des décennies, il a trouvé sur son chemin des hommes et des institutions qui, en le protégeant, ont méprisé ses victimes. Sur d'autres exactions, le temps et le droit ont fait leur oeuvre. Mais quand bien même, Klaus Barbie va devoir évoquer plus de... 750 victimes. Parmi elles, les innombrables déportés du dernier convoi du 11 août 1944. Réunis dans un même voyage au bout de l'enfer, juifs et résistants l'ont été une nouvelle fois par l'arrêt de la chambre d'accusation de la Cour d'Appel de Paris, de juillet 1986. Retenu également, le premier "fait d'arme" lyonnais d'un lieutenant qui a gagné ses galons en Hollande, notamment lors de la rafle d'Amsterdam en 1941 : la descente au Siège local de l'Union Générale des Israélites de France qui a permis, le 9 février 1943, d'arrêter 86 personnes et d'en déporter 84. Il faudra également se souvenir de Marcel Gompel, torturé à mort en janvier 1944, de Jean-Pierre et Georges Lesèvre, déportés en 1944. Enfin et surtout, il faudra évoquer les sourires assassinés des quarante-quatre enfants d'Izieu, dont Barbie a volé la vie un matin d'avril 1944. Quarante-quatre enfants dont aucun n'a pu échapper à la mort, comme six des sept adultes qui les ont accompagnés dans l'atroce périple. Le seul survivant de la rafle de l'UGIF ne sera pas là pour témoigner. li est décédé en mai 1985. Pendant trois jours, une vingtaine de survivants du dernier convoi viendront dépeindre l'Obersturmführer Barbie, ses coups de botte et de poing. Ils feront suite aux dépositions bouleversantes des familles des enfants d'Izieu. Izieu dont la seule survivante, Léa Feldblum, contera l'épilogue, le martyr des enfants à Auschwitz. Izieu et ses innocents pour lesquels Me Serge Klarsfeld s'est attaché à retrouver au moins un parent. Et puis, encore un récit de l'atroce avec les parties civiles individuelles, Lise Lesèvre, Elie Nahmias, Simmy Kaddosche croiseront le regard de leur bourreau. Plus de 750 victimes et seulement, 115 parties civiles dont dix sept associations. Des années déjà que l'évidence est apparue : en restant désespérément anonymes, les martyrs de Barbie et des siens sont morts deux fois. D'autres revivront à travers des proches venus demander réparation. Une expression qui paraît là encore plus dérisoire. Le procès de Klaus Barbie peut-il réparer les conséquences de la barbarie nazie ? Peut-il faire oublier à Itta Halaunbrenner que Minna et Claudine ont quitté un jour la campagne de l'Ain dans un camion pour découvrir à Auschwitz que les adultes peuvent être des monstres ? La réponse est facile. Source : "11 mai 1987, 13 heures : l'audience est ouverte" / Eliane Bègue in Lyon Matin, 11 mai 1987, p.3.

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